Des recherches en cours et projets en partage avec le Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris
I. Avant propos
Une fois n’est pas coutume, on s’intéresse ces jours et de plus près à la micro-biodiversité, la microscopique, avec qui nous vivons au quotidien et que l’on connait si peu.
Et en particulier à l’incroyable monde des parasites, micro-organismes qui vivent obligatoirement dans de plus gros êtres vivants, en inventant et faisant exister une très grande diversité de niches, de pratiques, de micro-biologies et de faciès, sans jamais tuer les organismes qui les hébergent.
C’est le sens du parasitisme :
un organisme vivant aux dépens d’un hôte, sans le tuer trop vite. On parle de co-évolution avec tout un pan de recherche scientifique qui y est dédiée.
À Goupil Connexion et l’Hôpital pour la Faune Sauvage de Ganges, nous ne pouvions qu’être sensibles à ces recherches.
Surtout que les notions rigides d’hier de parasitisme, mutualisme, commensalisme évoluent avec les connaissances complexes que nous en avons aujourd’hui (cf encart1).
- encart 1 MNHN 2013
Micro- et macro- biodiversité étant intimement liées, rien ne sert de s’angoisser avec la protection de la planète et de l’environnement ou d’instaurer des dogmes invivables si l’on ne se sent pas tous plus en lien au quotidien.
Y aurait-il sens à vouloir par excès de zèle ou de compassion protéger quelque biodiversité qui soit, animale ou végétale, du tigre du Bengale, l’ours, le loup, la fauvette passerinette, en passant par le vautour percnoptère, le vison d’Europe,
si l’on ne commençait pas par comprendre ce que l’on fait tous avec et dans cette grande complexité vivante d’un monde qui nous accompagne depuis des millions d’années ?
Qui aux balbutiements de l’humanité… nous a tout d’abord inquiétés mais très vite aussi intéressés, captivés, passionnés, du moins certains d’entre nous.
Il y a toute une micro-faune, une immense micro-biodiversité complexe avec qui l’on vit et qui ne nous veut pas que du mal, bien au contraire ; souvent méconnue, mal aimée, elle ne peut pourtant pas être plus proche de nos vies ! Certaine d’entre elle s’est immiscée, intégrée dans les génomes, cellules, organes. Nous avons tissé, sans toujours le savoir ni le comprendre et moins encore le vouloir, des liens intimes et magnifiques pour amener les êtres humains et la planète dans son ensemble à devenir ce que l’on est : une mosaïque d’une diversité époustouflante avec des ressources immenses, une capacité continuellement renouvelée d’adaptation et d’évolution, de créativité, d’intelligence collective.
Mais pour commencer d’entrevoir, observer, nommer cette minuscule biodiversité, microscopique… il a bien sûr fallu attendre l’invention d’outils adaptés comme les microscopes etc… c’était hier, à la fin du 19ème siècle…
Au 20ème siècle, on commença à connaître et décrire ces compagnons de route depuis des millions d’années, craints, vraiment pas désirés. Et l’homme apprit à s’en protéger évidemment… Beaucoup étant des dangers de mort certaine, avec virulence et contagion (variole… dont le 1er vaccin fut testé au 18ème sans savoir de quel agent infectieux il s’agissait, peste, paludisme, choléra, tuberculose…).
Au 21ème siècle, à côté d’une description fine et complexe loin d’être aboutie, avec des risques infectieux toujours en émergence, de possibles et inquiétantes mutations, évolutions, résistances, les scientifiques abordent une connaissance plus globale qui est l’écologie des maladies, l’éco-pathologie, c’est à dire une connaissance des liens et des équilibres des nombreuses interactions de tous ces micro-organismes, responsables à la fois de notre mort comme celle de notre vie…
C’est cette recherche en action qui permet de chercher et trouver de nouveaux remèdes ou préventions à des maladies qui touchent toujours les êtres humains dans un grand nombre de contrées pauvres, recherche récente qui dévoile cette fois un rôle positif du parasitisme, y compris dans nos pays occidentaux, éclairant autrement l’émergence de nouvelles maladies où nous n’avons toujours pas de réponses thérapeutiques effectives (maladies auto-immunes, de Crohn, etc…)
Tout cela fait cette micro-biodiversité d’indispensables compagnons de route à apprendre à mieux connaître sans en avoir peur toujours, tenter d’en comprendre leur évolution, dans le temps et dans l’avenir, pour s’en protéger certes, mais aussi en devenir curieux et partager la saveur de ce nouveau savoir, moins terrorisant aujourd’hui qu’à l’époque de nos grands-parents.
C’est le projet qu’on se donne ici à l’Hôpital pour la Faune Sauvage à Ganges : tenter d’en partager la connaissance, les émerveillements et les questionnements qui ont tous quelque chose à voir et à faire dans vos vies et chemin faisant pouvoir collaborer avec certaines équipes de chercheurs très intéressés aux parasites de la Faune Sauvage française, dont ils n’ont pas souvent eu les données.
Tout cela grâce à un lien « historique », intime de 30 ans déjà entre des scientifiques et chercheurs émérites en parasitologie et évolution du Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris (Pr Odile Bain et Pr Irène Landau) mis en lien grâce à au Pr Robert Killick-Kendrick (Imperial College - UK) et son épouse Mireille, protozoologiste et entomologiste médical spécialiste mondialement connu de la leishmaniose et du phlébotome, son vecteur, tous devenus amis et la jeune vétérinaire que je fus à mes débuts en Cévennes, en contact par définition avec les « grandes » zoonoses méditerranéennes (maladies transmises aux hommes par les animaux) comme furent par le passé il y a peu à Ganges, la Brucellose méditerranéenne ou la Leishmaniose canine…
Les Cévennes, les Garrigues ensoleillées de l’arrière pays Montpelliérain avec des troupeaux transhumants, des animaux sauvages et des hommes mêlés toujours en mouvement, sont un milieu méditerranéen essentiel et complexe s’il en est pour tenter de comprendre mieux ces maladies humaines et animales qui ont longtemps posé de graves problèmes aux humains.
C’est tout naturellement, qu’après avoir contribué à régler définitivement l’épineux problème français de la Fièvre de Malte méditerranéenne (par la vaccination en voie conjonctivale des jeunes agnelles une seule fois dans leur vie « d’une goutte dans l’œil » d’une souche vivante de Brucella melitensis mutée, le REV1), travaillant avec les médecins et les chercheurs en parasitologie et en entomologie pour mieux comprendre ce qui se passait entre une autre maladie souvent mortelle (la leishmaniose) et un parasite humain et canin des globules blancs, transmis par le phlébotome, minuscule insecte piqueur vivant dans l’écosystème des forêts mixtes sèches méditerranéennes, que nous avons continué ensemble de chercher à comprendre l’immense complexité qu’est la galaxie des protozoaires – parasites, explorée ici comme partout dans le monde.
La volonté à Ganges en 2008 de créer un Hôpital pour la Faune Sauvage pour accueillir et soigner au mieux les animaux arrivés de la nature en mauvais état ou en souffrance pour qu’il repartent au plus vite - animaux qui ne payent pas, récupérés dans un grand secteur Gard – Hérault- avec comme projet de se donner ensemble les moyens humains et techniques de plus grandes bienveillance et qualités avec recherche d’acquisition continue de compétences pour en laisser des pistes en direction des jeunes générations, fait d’échanges avec d’autres entités avec le même objet -comme le GREFA à Madrid en Espagne avec qui nous sommes jumelés-, nous ne pouvions qu’être intéressés à collaborer avec des chercheurs du MNHN de Paris, travaillant déjà sur un grand nombre de parasites de la faune sauvage partout dans le monde, mais plutôt pauvres en connaissances et en matériel provenant de la Faune Sauvage française.
Les derniers frottis d’identification des hémo-parasites de rapaces français sont de 1934, juste avant la 2nde guerre mondiale, la dernière guerre du siècle dernier.
Ainsi au sein de l’HFS Garrigues Cévennes nous collaborons à ces recherches d’intérêt scientifique mais aussi général, recherches à croiser avec d’autres équipes de recherche en Europe avec lesquelles nous sommes en lien… (comme le GREFA, le plus grand hôpital vétérinaire pour la FS d’Europe, où nous accueillons en juin 2013 pour 6 mois, dans des lieux encore et toujours en chantier à Ganges, deux jeunes vétérinaires espagnols pour travailler avec nous dans ce projet d’HFS sans frontières… Madrid, Barcelone, Dresde, et bien sûr le Centre Vétérinaire de la Faune Sauvage et des Ecosystèmes des Pays de la Loire à Nantes sur l’École Nationale Vétérinaire de Nantes, où fonctionne le seul autre et bien plus ancien centre de soins français avec une équipe vétérinaire, au travail sur la faune sauvage française, côté Atlantique).
Faire des recherches pour des scientifiques en demande réelle de matériel biologique est certes un projet scientifique en soi, mais pour nous ici à Goupil Connexion et l’HFS Garrigues Cévennes, il importe que ces enjeux scientifiques d’une grande complexité, donnant des pistes claires pour appréhender une intelligibilité globale, sensée et sensible du monde vivant, du micro à la macro biodiversité, il importe que ces enjeux complexes soient partagés et enrichis sur notre territoire avec le plus grand nombre, des petits aux grands.
C’est donc le projet actuel de travailler, aux côtés des chercheurs, non seulement à collaborer et initier des recherches spécifiques sur la FS locale, d’un niveau scientifique, international, mais à faire sens aussi à nous tous afin que nous soyons de plus en plus nombreux à en devenir curieux, intéressés, aimant, bienveillants…
Nous chercherons à partager l’intérêt et à travailler à une science qui émerveille, passionne, enchante et non une science qui éloigne l’humain de son essence, de son mystère, l’inquiète, lui fait peur.
Une biologie complexe ouverte sur tous ces « autres » qui nous habitent, nous croisent, nous enrichissent et nous font être ce que nous sommes, nous portant là où nous sommes arrivés.
C’est dans ce projet fomenté ici depuis quelques années, qu’une équipe d’une dizaine de chercheurs du MNHN de Paris est venue passer chez nous quelques jours sur le terrain Gangeois en mai 2013, pour nous rencontrer, montrer leur travail et réfléchir ensemble à ces croisements à inventer au fil de nos recherches et surtout de nos trouvailles et connaissances partagées.
II. Qui sont ils ?
Irène Landau, professeur émérite en charge des Sporozoaires au Muséum National d’Histoire Naturelle- rue Buffon 75 Paris.
- séchage des frottis par I Landau (à G) et C Martin, météo humide n’aidant pas !
Coralie Martin, chercheur INSERM en charge de l’équipe Filaires,
au MNHN élève du Pr Odile Bain, décédée l’an dernier et reconnue mondialement pour ses travaux sur les Nématodes parasites.
Gregory Karadjan, jeune scientifique, doctorant sur une thèse sur les coinfections Plasmodium-filaires et le polyparasitisme des Oiseaux par les Hématozoaires.
- Greg Karadjan et Magali Mary, jeune vétérinaire sur Ganges, intéressée à ces recherches
Nathaly Lhermitte-Valarino, experte en reptiles et amphibiens au MNHN, sur des recherches en filaires, en particulier les Rhabdias de la cavité buccale.
Emilie Le foulon, doctorante intéressée par des filaires de tout hôte, qui fait de la phylogénie moléculaire.
- Emilie à l’autopsie de l apie
Nathalie Dogna, animalière au MNHN, experte en prélèvements.
Adélaïde Nieguitsila, spécialiste d’arthropodes vecteurs.
Béatrice Compère, une botaniste responsable de la station universitaire du Limousin.
Yasen Mutafchiev, jeune chercheur bulgare travaillant sur les filaires.
Et bien sûr Mireille Killick-Kendrick, l’hôte qui a su tous les loger merveilleusement, leur mettant à disposition tout un étage de sa maison pour qu’ils installent un vrai laboratoire de campagne durant une petite semaine ! Mireille, l’amie, collaboratrice et épouse de notre ami Robert Killick-Kendrick, expert mondial en vecteurs des leishmanioses du monde entier, décédé il y a 2 ans.
III. Que viennent chercher les chercheurs ici à Ganges sur le terrain d’une faune sauvage française encore mal connue côté parasitisme ?
1/ Nathaly Lhermitte-Valarino,
l’experte au MNHN en parasites des reptiles et amphibiens
• Ce qui l’intéresserait en 1er serait de pouvoir récupérer - sur toute la France - des cadavres de Lacerta vivipara, même trouvés en mauvais état de conservation mais congelés…
Il héberge un parasite intestinal de la famille des Rhabdyasidés (vers de la famille des Nématodes) qui est à ce jour encore très mal décrit pour le monde scientifique. Il s’agit du « Skrjabinelasya ». Très intéressant et important à décrire plus encore que ce qu’il n’est à ce jour.
• Elle est intéressée par aussi TOUS CADAVRES DE LÉZARDS de la faune sauvage française. Et aussi des orvets et tout reptile de toutes espèces.
« Personne ne cherche… » Elle peut et veut prendre ce temps. À nous de « stocker », congeler, puis ils récupèrent et chercheront et… s’ils trouvent nous le rediront.
Nécessité donc de tout congeler… avec sur le sac une date et un lieu de prélèvement, et même si le cadavre est en mauvais état trouvé sur la route…
Nous verrons à quel moment soit le MNHN vient à nous, soit nous acheminerons le matériel biologique.
Ce qu’elle peut proposer pour l’hiver 2013 ou plus tard : Une séquence d’autopsies sur site, avec microscope, binoculaires pour montrer et faire une présentation, discussion.
S’intéresse aussi à tenter de corréler le taux d’infestation % âge et % aux lieux de découverte ; comprendre l’interaction entre hôte et parasites.
Par exemple, Nathaly connaît l’interaction entre pesticides des traitements des champs qui favorisent, d’après ses études l’infestation des jeunes.
TOUT L’INTÉRESSE CÔTÉ REPTILES ET AMPHIBIENS… y compris des grenouilles mortes (mais cadavres pas trop desséchés)
• Ainsi que des prélèvements non invasifs de Tarentola mauritanica, le gecko méditerranéen : séquences prises de sang à venir !
Les geckos intéressent au plus haut point les chercheurs car ils ont des virus dans les globules rouges, des Hémoproteus (c’est plus le côté d’Irène Landau) et des parasites – nématodes pulmonaires et les geckos représentent le chaînon manquant en terme d’évolution parasitaire.
Il serait bien de faire des prélèvements sanguins (dans le sinus orbitaire, situé dans l’angle médial de l’œil) avec des tubes capillaires que m’ont fait laissés les chercheurs. L’idée étant de faire immédiatement des frottis pour recherche de parasites sanguins (filaires et sporidies) et de mettre le reste dans un petit tube EDTA pour recherche en génétique moléculaire.
2/ L’équipe des Hémoparasites des Oiseaux : (Pr Irène Landau et Grégory Karadjan)
• Ce sont les sporidies parasites des globules rouges, les « malaria-like » des oiseaux étant connus pour avoir comme vecteurs des insectes hématophages, sujet qui intéresse au plus haut point l’équipe menée par Irène Landau pour « que, sur ce sujet là où tout le monde fait n’importe quoi, les gens travaillent bien et mieux ! »
En photos les parasites sanguins des globules rouges des rapaces.
Et quelques vecteurs (de la famille des diptères) de ces parasites : les pupipares.
Qui nous nous intéressent particulièrement ! Pour cela parcourir l’article joint en pdf en pied de page
Une exigence :
donner UN NOM aux parasites, à partir principalement de la MORPHOLOGIE (comité international).
Puis connaître mieux ses affinités, proches ou éloignées, c’est à dire son histoire évolutive.
Enfin, connaître le cycle complet du parasite, c’est à dire mettre en évidence le vecteur, le parasite et son stade évolutif dans le vecteur, la biologie moléculaire etc…
Pour avoir une idée générale, il y a 9000 espèces d’oiseaux dans le monde, 300 espèces d’hémoparasites des oiseaux… et de nouveaux genres qui arrivent chaque mois de par le monde.
• L’enjeu du laboratoire des Sporozoïtes du MNHN mené par le Pr Irène Landau est de « mettre de l’ordre » dans cette description.
Irène travaille sur des organites cellulaires de ces hémo-parasites des oiseaux (malaria-like) nommés « grains de volutine » : certains genres en ont, d’autres pas. Ce sont des poches enzymatiques qui contiennent du calcium et que l’on trouve préférentiellement sur des parasites d’oiseaux du genre : Accipiter (Éperviers), Strix (Chouettes hulottes), jamais sur les falconidés.
Tout d’abord, de part son historicité et son « ancienneté », Irène est seule en lien avec ses anciens collègues et alter-ego, à ce jour tous décédés, que ce soit Bob Killick-Kendrick, pour les phlébotomes avec un lien intime avec son mentor de l’époque, le Pr P C Garnham, le père mondial de la parasitologie et du paludisme, mort en 1995, ou encore Odile Bain, éminence mondiale du MNHN en Filaires et Alain Chabaud, le moteur de tout un département de recherches de terrain complexes sur les Vers au MNHN, tous trois récemment décédés, tous passeurs éminents d’une recherche pertinente à ne pas oublier si ce n’est lâcher.
Irène Landau se propose au sein de ce nouveau collectif rassemblé en 2013 autour de l’HFS Garrigues Cévennes et de nos recherches communes, d’écrire un texte sur l’histoire évolutive des maladies parasitaires pour commencer.
Ainsi sur ce que « collection » du MNHN signifie aussi dans le temps pour des générations de chercheurs à venir.
Nous avons tous à comprendre mieux ce que l’on fait ici et dans quelle aventure nous sommes tous trempés.
• Enfin, ce qui les intéresse au plus haut point et là où nous pourrons croiser nos intérêts communs, c’est d’étudier de manière systématique, si l’on peut, TOUS les parasites intra-érythrocytaires (globules rouges) et donc examiner les frottis de tous les oiseaux de la faune sauvage française, théoriquement du passereau au rapace, du juvénile à l’adulte blessé, que l’on croisera sur notre chemin…
Avec une attention supplémentaire sur tous les vecteurs potentiels déjà supposés que sont les PUPIPARES de ces parasites sanguins. Recherchons pupipares désespérément !
« Nous » (eux surtout…) avons déjà trouvé des choses intéressantes en 2012 et publié une communication sur Folia Parasitologica sur des parasites sanguins d’une Chouette Hulotte adulte française et du lien avec le stade de son parasite trouvé ce même jour dans le vecteur, où une première fois est décrit le stade infestant du parasite du rapace infesté.
Voici le poster qui va être présenté au prochain Congrès International sur Malaria en Lituanie - International Conference on Malaria and Related Haemosporidian Parasites of Wildlife 2013. Dont le programme complet joint, où un début de nos recherches débutantes croisent rien que du beau monde !
- Poster présenté au congrès parasitologie international en août 2013 à Vilnius... à partir de parasites découverts chez une chouette hulotte de Ganges !
en pdf ici :
De l’importance de ces recherches à conduire.
Pour mémoire, depuis les travaux de Garnham entre 1910 à 1935 sur le paludisme humain partout dans le monde, le plasmodium le plus étudié fut celui de la poule. Tous les oiseaux sont potentiellement intéressants et c’est ce que nous faisons de manière quasi systématique sur la plupart si ce n’est tous les oiseaux arrivés à l’Hôpital pour la FS Garrigues Cévennes : une fois stabilisés, nous prélevons du sang pour 3 lames en frottis et le reste dans un tube EDTA pour la bio-moléculaire, si positif. Tout cela pour comprendre l’incidence de pathologies « malaria-like », pathologies parasitaires dont on ne connaît pas grand chose actuellement, en fonction de l’état de santé général de l’animal prélevé, en lien avec son âge, son statut sédentaire ou migrateur, son espèce, la présence ou pas de parasites externes, comme les pupipares à récupérer « vif ou mort » de manière impérative.
Une thèse vétérinaire pourrait là travailler sur ce domaine pour en synthétiser les données actuellement disponibles.
3/ L’équipe des Filaires (Coralie Martin) responsable de ce département au MNHN.
Tout intéresse Coralie : les micro-filaires sont observées à partir d’une goutte épaisse de sang ou lors du prélèvement du sang pour les frottis de recherche d’hématoprotozoaires… Lorsque les frottis sont colorés à Paris et lorsque beaucoup de microfilaires sont présents sur la lame, le cadavre l’intéresse alors (comme ce fût le cas du Balbuzard fluviatile euthanasié au printemps 2013 suite d’une grave fracture alaire). Il est parti congelé au MNHN mi mai 2013… la suite est à venir !
Émilie Lefoulon est une jeune doctorante de son équipe travaillant sur la phylogénie moléculaire de ces parasites, très motivée à retrouver des parasites sanguins et travaille actuellement sur la biologie moléculaire de ces filaires. Son travail porte sur la présence ou absence selon les genres d’une bactérie mutualiste – symbiotique de la famille des Wolbachia de certaines filaires tropicales qui dans certains cas, répondraient alors parfaitement à un traitement antibiotique type Doxycycline®.
Théoriquement donc tout intéresse : il suffit d’une goutte épaisse de sang sur lame et ils étudient tout, sans oublier les mammifères, des chauves-souris, de l’écureuil au blaireau…
Sur le fond, nous avons discuté comment communiquer pour agrandir le cercle :
déjà activer des collaborations qui n’existent pas actuellement auprès des différentes entités qui touchent de la Faune Sauvage française (via la profession vétérinaire, la presse professionnelle, les vétérinaires régionaux motivés, souvent désemparés ou trop occupés dans leurs quotidiens… et bien sûr le Centre Vétérinaire de la Faune Sauvage et des Ecosystèmes des Pays de la Loire à Nantes, en lien avec l’école nationale vétérinaire de Nantes ; via aussi l’UFCS, l’union française des centres de soins pour la faune sauvage mais où manquent généralement les vétérinaires au quotidien - les vétérinaires responsables pourraient y contribuer)
fabriquer, collecter ainsi ces connaissances à acquérir.
puis comparer par la suite les études d’autres entités similaires, d’autres recherches européennes : un certain nombre d’Hôpitaux pour la Faune sauvage existent en Europe (Madrid, Barcelone en Espagne, Dresde en Allemagne…) où des études similaires ont déjà
eu lieu ou sont conduites actuellement ; le moment serait pertinent de faire une synthèse sur les méthodes et les conclusions qui en sont sorties, ne serait-ce que pour savoir si nous parlons des mêmes choses, des mêmes parasites.
Voilà encore une piste de travail à venir ici.
L’autre projet serait de tenter de faire une corrélation entre charge parasitaire observée et état de santé – statut de l’animal prélevé. Corrélation entre âge de l’animal, poids, migrateur ou nom, pathologie intercurrente, etc… et d’y lier le parasite externe présent, le pupipare, lesquels…
Un protocole est installé pour que « même les morts à l’HFS puissent aussi servir à la science »… Si mort moins de 3 H, on peut faire des appositions des organes importants type cœur, foie, rate, poumon, cerveau, moelle osseuse et ainsi produire des connaissances post mortem.
L’idée générale sous-tendue est de pouvoir, moyennant une collaboration active pour l’instant pro bono (non rémunérée mais très motivante), d’évaluer la parasito-faune des espèces sauvages françaises (déjà en matières d’hémosporidies et de filaires) avec une approche non-invasive (car on ne sacrifie pas d’animaux).
Et continuer d’explorer l’histoire évolutive, cette co-évolution entre vecteurs et hôtes parasités… à l’échelle historique mais aussi mondiale.
Et pour cela, un état des lieux à un moment donné est intéressant et nécessaire ; c’est un inventaire, une approche de recherche en écologie parasitaire.
On comprend ainsi comment on vient juste de découvrir les plasmodium des rongeurs (1945) avec un chaînon manquant entre gecko et reptiles qui est capital. Ou encore qu’il y a une richesse incroyable sur les reptiles américains, africains ou asiatiques en hémoproteus…
Pour cela il faut travailler et conduire des recherches de qualité sur nos reptiles et tout autre faune sauvage européenne pour tenter de comprendre.
Toute un pan de la parasitologie des oiseaux est aussi à corréler avec les migrations, la dérive des continents (Wegener, 1919), l’évolution des climats (21ème siècle). Passionnant à suivre en Europe, en France… à commencer sur la faune locale si on s’en donne les moyens.
Et le faire savoir au plus grand nombre d’entre nous... La recherche, l’intelligibilité, l’émerveillement du monde pour nous ne sont pas une chasse privée à réserver qu’à une élite, un plan carrière à protéger des aléas économiques mais bien un savoir, une saveur du monde à partager et ré-enchanter tous ensemble. Pour faire aimer passionnément la petite et la grande biodiversité, la faire connaître sans limite dans un plaisir partagé !
4/ Enfin l’intérêt que je porte, en tant que vétérinaire responsable de l’HFS GC, sur le « à quoi peut bien servir cette micro-biodiversité » ?
Partant d’un texte de Massimo Sandin de Madrid croisé en 2003 (cf encart 2), je propose de relier ce travail d’investigation - réflexion des parasitologues du MNHN à un pan de la recherche fondamentale et évolutive actuelle sur les associations symbiotiques et le rendre compréhensible au plus grand nombre autour de l’HFS…
Aimer les animaux, son chien, ses vaches ou brebis, son chat, son cheval, son perroquet…
Même… les animaux sauvages, c’est une chose. Vouloir les aider, apprendre à faire mieux ensemble (c’est là toute l’aventure humaine portée par l’HFS GC), en est une autre.
Mais comprendre ce que nous faisons les uns avec si ce n’est dans les autres… Cela est encore plus passionnant et peut se partager sans modération.
À notre époque dite « moderne »… où l’incertitude de la complexité du monde, aggravée par sa méconnaissance, est vécue comme une angoisse, où les boucs émissaires sacrificiels ressurgissent ; c’est le moment de trouver des liens et du sens ensemble, de se remailler les uns les autres et surtout les uns avec tous ces autres inconnus que sont tous ces étrangers… humains, certes et non humains (qui ne parlent pas et se défendent peu, eux) pour commencer et qui ne nous voudraient que du mal à nous lire parfois… Un textile humain et non humain à remailler, à coudre ensemble, tous ensembles. Au pays de la Haute Couture, des grands scientifiques et naturalistes, pays des Lumières, on devrait savoir faire…
Comme l’écrivent Lung et Poulin (encart 1), la symbiose étudiée partout non seulement est vue aujourd’hui en pleine évolution à l’échelle évolutive, historique, ontogénique, mais avec sa grande adaptation de nombreux scientifiques montrent qu’elle est à l’origine des espèces et que rien ne sert de se battre contre, mieux vaut faire « ami-ami » ! De la petite à la grande, il nous faut en devenir au moins curieux si ce n’est ami…
Discours autrement plus serein que bien des dogmes écologiques inquiétants sur l’avenir incertain de la planète.
Parasites, bactéries, virus, mieux vaut trouver l’équilibre, « the fine balance »…
Cela se traduit simplement, de manière empirique déjà sur le terrain avec de bonnes pratiques en matière d’élevage (et des démarches de prévention fonctionnelles depuis des années ici en Cévennes en élevages bovins, ovins, caprins, et partout ailleurs ou la prévention prime) ou encore dans la gestion de la leishmaniose par exemple.
Primum non nocere : base d’une médecine de qualité, vieille d’Hippocrate et d’Averroes, où l’on cherchait à comprendre comment maintenir les hommes en bonne santé.
Les désordres, les excès en pesticides, autres biocides, antibiotiques… et les effets sur la santé des populations s’invitent partout à nos quotidiens ces jours…. Comment soigner et surtout prévenir les maladies des hommes et des animaux ?
Si l’on revisitait la parasitologie, la virologie, la microbiologie comme autre chose que des guerres de plus à mener, de nouvelles à gagner ou à perdre…
Et si l’enjeu était tout autre ?
C’est cette réflexion au sein de l’HFS GC et de cette collaboration en parasitologie en lien avec la FS que nous allons tenter d’éclairer et alimenter.
Compréhension mutualiste du monde qu’on aimerait observer, argumenter puis, si cela était possible, diffuser à l’occasion de réunions publiques, où les chercheurs pourraient montrer ce qu’ils ont trouvé, expliquer – microscopes aidant - ce qu’ils font là en donnant une explication positive passionnante sur une complexité du monde vivant dans lequel nous nous vivons depuis des millions d’années.
Ne pas rester que théorique (tout le monde n’en verra pas d’intérêt) mais, pour commencer le lier aux nouvelles pathologies humaines qui posent problèmes aux médecins et aux malades d’aujourd’hui !(tout le monde a peur de tomber malade… d’une maladie compliquée incurable de plus).
Comme par exemple le fait (le travail de Coralie Martin l’aborde dans des études) que les parasites intestinaux désormais disparus en pays développés semblent laisser s’installer, émerger de nouvelles pathologies graves chez les humains, comme les maladies auto-immunes, la maladie de Crohn… mal soignables… bien moins que celles qui existaient quand les parasites intestinaux ou autres existaient.
C’est là dessus que les connaissances des parasites peuvent donner des pistes pour les médecins actuels… Dans certains cas, une charge parasitaire est même installée pour éviter que l’organisme humain ne s’affole contre lui-même, principe de la maladie auto-immune, de plus en plus fréquente dans nos pays modernes… hygiénistes s’il en est.
Faire, par ces connaissances complexes, mieux comprendre l’évolution parmi tous ces autres autour de nous, comme par exemple, réapprendre que les principaux sauts évolutifs se sont faits par l’intégration de génomes d’espèces distinctes, de bactéries et de virus qui sont considérés comme la plus grande réserve de diversité et surtout par leur capacité à s’adapter très vite à des milieux environnants changeant et difficiles.
Nos génomes ainsi ne nous appartiennent pas seulement…
Mais, fait bien plus rassurant pour nos sociétés inquiètes, nous sommes une mosaïque de génomes associés… et nous ne sommes pas seuls au monde si nous l’avions oublié !
Ou encore, sans eux nous ne serions pas ce que nous sommes !
La version de l’homo sapiens se battant seul contre tous les maux de la planète est dépassée. Mais, comment ça s’est fait ?
Du plus superficiel au plus profond, a été d’abord essayé… puis adopté sur la planète :
C’est une autre description des associations symbiotiques, où les frontières n’existent plus vraiment (cf encart 1).
le commensalisme, pour commencer, où l’on a fait « ami-ami »… où l’on vit côte à côte… sans trop d’interactions complexes… on profite des uns et des autres quand on le peut, sans se faire du mal.
puis ce fût le mutualisme, le vivre avec, où le comportement des espèces impliquées a été affecté pour vivre ensemble. Les vautours et les hommes actuellement, dans un intérêt mutuel. L’intégration au niveau comportemental.
puis arrive la symbiose métabolique, qui agit à un niveau plus intime, le niveau métabolique, comme le lichen associé à une algue, où l’excédent métabolique de l’un profite à l’autre et protège l’autre. L’intégration agit au niveau métabolique.
Puis c’est une association productrice de gènes, comme les rhizobiomes des racines, où des protéines de l’un sont nécessaires pour le fonctionnement de l’autre : la plante fabricant la protéine, la bactérie des racines produit le groupe hème pour que l’hémoglobine éloigne l’oxygène des racines. Pour faire fonctionner l’intégration au niveau de la production de protéines d’intérêt commun, les gènes se sont mis à travailler ensemble.
Enfin, le dernier niveau est l’intégration à l’échelle génétique qui ouvre à un nouveau stade évolutif : ce sont les chloroplastes qui ont suivi des plastides (des cyanobactéries) et les mitochondries (bactéries rouges) qui sont entrées définitivement dans les génomes des nouvelles espèces.
L’essentiel résidant dans la durabilité du système et sa grande capacité d’adaptation.
Une autre donnée, connaissance liée aux virus… de bien plus petits organismes encore que les parasites étudiés par nos chercheurs du MNHN. Virus, même pas peur ? C’est toujours la bouteille à moitié vide et à moitié pleine, le virus comme les bactéries, il y en a de bons…
L’idée sous-tendue est que le génome humain ou animal, comme tous ceux des autres êtres vivants est constitué par la somme de génomes bactériens et viraux, génome résultant de liens très anciens avec ces bactéries, virus et autres micro-biodiversité existant à nos côtés depuis la nuit des temps. Compagnons de vie.
Les virus permettent des transferts d’informations horizontales.
Nous ne sommes plus dans l’angoisse de l’épidémie grippale… Il y a des virus symbiotiques, sympathiques….
Comme par exemple la protéine régulatrice HOX qui provient de virus rétrotransposons sans capsides (homéoboxes) et permet de modifier très tôt en embryogénèse certains traits phylogénétiques. Le rôle des rétrovirus est très important : ils sont très abondants sous la forme de rétrovirus endogènes (Ers) et leurs protéines participent lors de nombreux processus comme la placentation. Tous ces éléments mobiles et leurs séquences répétées comme les virus endogènes qui constituent la plus grande partie des génomes peuvent être activés expérimentalement lors d’agressions du milieu. Et explique ainsi les grandes modifications vues dans le registre fossile. La mutation d’un virus comme le Sida pourrait provenir d’un rétrovirus normalement présent et nécessaire à l’immuno-dépression lors de gestation.
L’information ne se trouve pas déposée dans l’ADN, mais elle est produite par l’interaction de l’ADN, l’ARN et d’une énorme quantité de protéines… qui dépend d’une multitude de facteurs dont les plus importants sont les restes du génome et l’ambiance cellulaire (dépendant elle du milieu extérieur). Ce qui veut dire que les gènes sont une part seulement du circuit complexe qui est le vrai responsable de l’information transmise.
Nous verrons chemin faisant comment construire, argumenter, explorer et continuer d’étayer ces idées et ces faits, les diffuser autour de nous, en s’appuyant sur les observations que nous ferons au quotidien entre FS et humains.